Le film d’Eric Lartigau – #Jesuislà – envoie Alain Chabat à Séoul grâce à Instagram. Un film au scénario assez classique qui dresse un portrait rare de la Corée. Festival International du film à Busan.
Il raconte l’histoire de Stéphane, un chef français qui s’ennuie dans sa vie. Déconnecté de son quotidien, sa famille – ses deux fils et son ex-femme – son restaurant et ses clients, il développe une obsession pour Soo, une coréenne qui le fait rêver et qu’il suit sur Instagram. Les deux discutent jusqu’à ce que, sur un coup de tête, Stéphane décide d’aller la rejoindre à Séoul. Un voyage en terre inconnue qui va le confronter à lui-même et lui permettre de se découvrir.
On ne va pas vous mentir : s’identifier à un quinquagénaire bedonnant, un peu pathétique et mal à l’aise sur Instagram ne nous était jamais arrivé auparavant. Probablement, vous non plus ! Seulement, si vous aimez la Corée, sa culture, ses particularités, il vous sera impossible de ne pas vous retrouver dans les yeux de Stéphane, ils pétillent lorsqu’il raconte le pays et ses gens, lorsqu’il parle du kimchi, de la gentillesse des inconnus, de leur rudesse.
L’émotion est tellement forte pendant ces scènes de partage que le scénario passe presque au second plan. Le film est objectivement divertissant mais sa force est dans la subtilité avec laquelle il raconte le choc de deux cultures – la culture française et la culture coréenne.
1. Voyager au hasard
Que votre intérêt soit tout jeune ou que vous soyez déjà allé y vivre pendant deux ans, vous allez vous retrouver dans cette vision moderne que le film offre de la Corée du Sud. On passe seulement par les lieux les plus emblématiques : l’aéroport d’Incheon, le marché de Gwangjang, de vieilles allées séoulites.
Mais on en voit aussi les coins cachés, ces lieux que l’on ne montre jamais, ces portes devant lesquelles on passe sans s’émouvoir. On saute d’un plan du large et emblématique boulevard de Jongno à un plan dans une minuscule rue bondée, d’une scène où la barrière du langage crée un malentendu à une scène où elle offre une magnifique rencontre, d’un moment de solitude terrifiant à un moment de convivialité inattendu. Le film reflète la Corée qui change, la Corée qui surprend, la Corée qui ravit, la Corée qui déçoit, la Corée qui blesse, la Corée qui ne vous laisse jamais indifférent.
Via ce regard d’un étranger sur la ville, on est loin du sentiment que peuvent laisser un film coréen, un drama coréen ou un clip de K-pop. Il ne s’agit pas de raconter les difficultés à l’école, le fossé entre les différentes classes de la population, l’incompréhension entre jeunes et plus âgés. Il ne s’agit pas de critiquer ou de faire la promotion du pays. #jesuislà raconte le dépaysement, raconte dans quelle mesure la Corée est ce qu’elle est – et ce que Stéphane, voyageur d’à peine une dizaine de jours, en comprend. Le film est à propos de nos irréconciliables différences et de la beauté des gestes qui nous permettent de communiquer et de nous lier malgré tout.
#Jesuislà vu par les coréens
« Pendant le temps où j’ai travaillé sur #jesuislà, j’ai eu une sorte de révélation : une nouvelle compréhension d’à quel point les étrangers perçoivent différemment Séoul, qui est si familière pour moi. A travers cette nouvelle expérience de Séoul et de la manière dont le film a été tourné, je l’ai observée avec un oeil plus esthétique et exotique. Je me suis sentie comme une hôte, pendant le tournage – je voulais que l’expérience [de l’équipe] reflète ce que Séoul signifie pour moi. » (Bae Doo-na, Interview dans The Officiel) « Je suis triste de constater que les coréens apparaissent aux yeux des étrangers comme des gens très occupés, indifférents aux autres. »(Jang Hye-ryung, journaliste pour OhMyNews)
IDENTI-K
#JESUISLA
Réalisateur : Eric Lartigau
Scénaristes : Eric Lartigau et Thomas Bidegain
Casting : Alain Chabat, Bae Doona, Blanche Gardin, Ilian Bergala, Jules Sagot, Camille Rutherford, Delphine Gleize.
Genre : Comédie – Romance
Sortie en Salle : 5 Février 2020